justiceDiscrimination à l'adoption : le parquet ouvre une information judiciaire

Par Nicolas Scheffer le 30/06/2020
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En 2018, la responsable de l'adoption de Seine-Maritime assumait de discriminer les couples LGBT+ dans leur parcours d'adoption. Une information judiciaire est ouverte pour "discrimination".

Les couples homoparentaux n'étaient pas prioritaires pour adopter. En 1028, la responsable de l'adoption du département de Seine-Maritime, Pascale Lemare, lâchait au micro de France Bleu que les couples homos "sont un peu atypiques par rapport à la norme sociale mais aussi la norme biologique. [Il faut donc] que leur projet supporte des profils d'enfants atypiques."

Selon la radio locale, le parquet de Rouen a récemment ouvert une information judiciaire pour "discrimination" et "incitation à la discrimination". Cette procédure intervient après deux ans d'enquête et d'auditions de témoins. Après ces propos discriminatoires, la responsable de l'adoption a été relevée de ses fonctions.

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Un rapport de l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) a statué qu'une "sélection s'est imposée progressivement dans le parcours des adoptants : une information dissuasive pour les célibataires et les homoparents et une sélection plus restrictive des célibataires à la phase d'apparentement". Entre 2013 et 2017, l'adoption était proposée aux homoparents que "pour des enfants ayant des besoins spécifiques", c'est-à-dire en mauvaise santé ou en situation de handicap.

Une discrimination couramment pratiquée en France

Deux associations LGBT+ ont porté plainte contre X. Selon leur avocate Julian Massardier, cité par France Bleu, "cela veut dire que c'est pris au sérieux et qu'on a déjà des éléments suffisants pour se questionner sur ces pratiques discriminatoires".  Le Conseil départemental explique avoir suivi les recommandations de l'Igas. Un film qui faisait la distinction entre les couples LGBT+ et hétéros a été supprimé et les dossiers sont, depuis, traités par ordre chronologique. Les demandes homoparentales sont désormais plus nombreuses.

Dans son rapport, l'Igas souligne que le contrôle n'a porté que sur le département de Seine-Maritime. "Il ressort des entretiens nationaux que l'exclusion des célibataires de l'adoption nationale serait couramment pratiquée dans une majorité de conseils de famille en France", écrivent les inspecteurs.

Des avancées à Paris

À Paris, le Conseil a souhaité un geste fort. En 2019, le préfet de région, Michel Cadot a annoncé le renouvellement des deux conseils de famille parisiens. "Les nominations que je viens d'arrêter (...) prennent désormais mieux en compte les évolutions de la société et de la loi en matière d'adoption", écrivait-il dans un texte révélé par Têtu.

La mairie avait par ailleurs demandé au préfet de tendre vers l'anonymisation des dossiers. Michel Cadot, expliquait avoir saisi le ministère de la Santé "afin de lui permettre d'en étudier l'opportunité et la faisabilité juridique". On attend.

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Crédit photo : PATRICIA DE MELO MOREIRA / AFP.